L’Extrême Nord Cameroun face aux Violences Basées sur le Genre
L’Extrême Nord Cameroun face aux Violences Basées sur le Genre
Bilkissou Alh Ibrahima, Spécialiste en Genre et Relations internationales, Doctorante en science politique à l’Université de Maroua, Expert
VBG, responsable de Centre Vie de Femme Maroua ALVF-EN
Malgré la prise en compte de « la voix de
toutes les femmes dans le monde entier et tenant compte de la diversité des
femmes, de leurs rôles et de leurs conditions de vie, rendant hommage aux
femmes qui ont ouvert la voie[1]
par les chefs d’Etats et de gouvernement du monde, les Violences Basées
sur le Genre (VBG) demeurent récurrentes
dans le monde, tout comme en Afrique notamment au Cameroun où les ethnies/cultures
sont multiples et variées. La Région de l’Extrême Nord en est la spécificité
far de cette situation. S’il ya bien des efforts d’avancement notés sur les
femmes et filles, la problématique de fond reste d’une autre
nature. Ainsi 900/0 de la population vivent la violence au
sein de la famille, soit au sein de leur environnement scolaire (école-lycée-Université
–institut …), soit dans la communauté ou entourage ou sociétal.
I-
Analyse
contextuelle de l’environnement sociétal par rapport aux VBG
Les MPF[2] –les
violences conjugales-les violences sexuelles et émotionnelles sont vécues constamment par les femmes et les
filles de la Région. Elles ont tendance à croire qu’elles vivent dans la
normalité (par ignorance ou par la peur).
La liberté d’expression étant toutefois limitée au sein de leur famille
et de manière générale au sein de la société à laquelle elles appartiennent,
elles ont tendance à se renfermer sur elles,
elles n’en parlent presque pas, même pas pour se confier à une amie.
Elles subissent tous en silence, se disant que c’est une situation normale et
intime ; c’est honteux de dévoiler l’intimité. Et même lorsque qu’une
victime /survivantes, arrive à briser le silence sur la violence vécue, se rendant aux services de
protection appropriée, la preuve de celle-ci a déjà disparu où l’irréparable est déjà commis (le mariage précoce et viol avec pour conséquence
une grossesse …).
Des nombreuses plaidoyers ont été réalisées
tant au niveau local, nationale qu’internationale par la chaine des
intervenants sur les VBG. ALVF-EN fait partie des organisations pionnières de
lutte contre les violences faites aux femmes dans la région de l’Extrême Nord.
Elles a à cet effet effectué plusieurs études et plaidoyers notamment en ce qui
concerne les MPF.
Mais malgré ces efforts de luttes et les
multiples sensibilisations réalisées par
ces organismes (Organisation de la Société
civile, ONG, et Organisations Internationales) qui sont diversifiées aujourd’hui
dans la Région, la situation reste problématique et pitoyable : ceci du
fait
-
Du Manque ou insuffisance de l’éducation
-
De l’ignorance de lois existant par la population hommes, femmes, jeunes
-
Du Poids de la tradition , de la culture selon les ethnies
De la Religion; musulmane, chrétienne...
Ainsi, d’aucunes sont convaincues
que certaines situations intimes ne doivent pas être exposées aux tiers personnes (Services sociaux ou de droit de
l’homme). Car « le linge sale se lave en famille » dit-on. D’autres par
contre pensent par ignorance que les traditions autorisent réellement les
atrocités à l’égard des femmes et en luttant contre cela, elles risquent de se
retrouver en marge de la société, rejetées et
abandonnées complètement par la
communauté à laquelle elles appartiennent et surtout moditent. D’autres enfin pensent encore que
c’est l’œuvre de la religion et s’opposer à cela, reviens à pécher face à Dieu.
I-
Critique
situationnelle
Les problèmes persistent du fait
du :
-
Manque d’engagement réel de la part des chefs traditionnels
dans la prise en compte de la lutte
contre les VBG
-
Manque du sérieux de la part des leaders
et chef religieux dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles,
- La non participation des femmes influentes et
importantes de la Région dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles,
-
L’ignorance l’évolution juridique du statut de
la femme et de la fille
Cependant la
communauté devrait savoir que « le
privilège accordé à l’élément féminin n’emporte pas négligence de l’élément
masculin »[3]. Car,
les VBG c’est une affaire de tous et de toutes. Elles peuvent exister ou se
manifester partout et par n’importe qui quelque soit le lien familial qui lit
la victime à son agresseur. La position
sociale ne protège pas contre les violences sexuelles et sexistes, ce n’est pas
non plus parce qu’on a beaucoup fréquenté qu’on est à l’abri des VBG.
Non ! Les VBG sont vécues dans toutes les couches sociales, toutes les femmes
et les filles analphabètes, ignorantes, instruites, sont exposées aux VBG ou les vivent. Ceci du fait qu’elles ont
la tradition, la culture, la religion enracinées dans leurs peaux et leurs âmes
ou alors de la honte et de l’ignorance de leur portée tant physiologique que
psychologique, ne les dénoncent pas.
II-
Perspective
Le changement viendra avec le
temps certes pas aussi rapidement que l’on imagine. Car en se référant aux propos de Durkheim
selon lesquels : « les institutions rendent possibles les relations
sociales et les activités économiques non seulement parce qu’elles règlent les
conflits d’intérêt, mais aussi et surtout parce qu’elles permettent la
perception et la définition mêmes des intérêts individuels, lesquels dépendent
toujours d’un critère d’évaluation qui les fonde », il
parait ainsi pertinent que les actions en transmisent aux personnes cibles ( communautés,
femmes, filles, chefs traditionnels et religieux) :
-
Une culture réelle d’éducation aux droits
Humains serait nécessaire et l’inclusion de celle-ci au sein du milieu scolaire
dés la maternelle jusqu’aux études supérieures,
-
Une culture du changement positif pour les
communautés,
-
Une culture de la liberté d’expression ;
-
Une culture de solidarité, d’amour et de la Paix
dans toutes les relations
L’effectivité prendra court en :
-
Responsabilisant les chefs traditionnelles et
leaders religieux,
-
Vulgarisant d’avantages les lois sur les
violences faites aux femmes et aux filles ;
Notes
1-
Danielle
JUTEAU et Nicole LAURIN. «L'évolution des formes de l'appropriation des femmes
: des religieuses aux "mères porteuses"», CRSA/RCSA, Toronto, mai
1988, p. 194.
2-
Luc
Sindjun, Mathias Eric Nguini OWANA, Egalité oblige! Sens et puissance dans les
politiques de la femme et les régimes de genre, Pp 13-77
3-
Déclaration
de Beijing, 1995
[2] Confère l’Association de lutte contre les Violences
Faites aux Femmes de l’Extrême Nord (ALVF-EN), en ce qui concerne les Mariages Précoce et Forcés, le document
sur les recherches menées par l’institut du sahel en partenariat avec l’ALVF-EN
[3] Luc
Sindjun, Mathias Eric Nguini OWANA, Egalité oblige! Sens et puissance dans les
politiques de la femme et les régimes de genre, Pp 13-77
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